Les enjeux de cette année scolaire, détaillés par Jeff Manal, le nouveau directeur de La Maison Familiale du Nord (MFR) située à Calebasses.
- Après SOS Children’s Village Mauritius, vous avez rejoint La MFR du Nord début novembre, rappelez-nous les missions de cette école.
Avant tout, nous préférons le terme de « Maison » à celui d’école. Ensuite, nous soulignons qu’il s’agit d’une association « familiale », puisque logiquement les familles jouent un rôle prépondérant dans l’éducation et la formation des enfants. La famille est donc un pilier de notre association. Le concept de maison familiale, telle que mise en œuvre en France, a été importée à Maurice par Raj Jatoo en 1993. Objectif : œuvrer à la formation professionnelle et sociale des jeunes. L’autre pilier étant la formation par l’alternance. Autrement dit, le jeune est en établissement une semaine et deux semaines en stage professionnel en entreprise.
- Dans quels domaines en particulier formez-vous les jeunes ?
La mécanique automobile et la cuisine. De plus, grâce à notre partenariat, depuis octobre 2015, avec Forena, les jeunes seront aussi exposés à l’agriculture biologique. Un de nos anciens élèves va s’occuper du jardin quotidiennement. Depuis 1993, ce sont environ 700 jeunes qui sont passés par la MFR du Nord et qui ont été embauchés à différents niveaux hiérarchiques et dans différents secteurs. C’est merveilleux que des enfants désœuvrés réussissent au bout de 3 ans à devenir « employables ».
- Un message pour les parents et les élèves pour la rentrée ?
Actuellement, je reçois encore des parents pour les inscriptions. Mon message c’est que le plus grand des diplômes ou la plus grande des réussites, ce n’est pas d’afficher un bout de papier sur un mur, mais bien de décrocher un emploi épanouissant. Aux nouveaux élèves je leur dis que mon rêve c’est que leur rêve se réalise. Je crois beaucoup dans l’alternance, car j’ai moi-même un proche, qui avait beaucoup de difficultés en primaire et qui après avoir découvert sa vocation dans la soudure, a progressé petit à petit… Aujourd’hui il a son propre atelier et gère en plus une grosse succursale. L’académique, ce n’était pas du tout son truc et cela ne l’a pas empêché de trouver sa voie !
- Il est donc encore temps de s'inscrire, quels sont les critères pour entrer à la MFR ?
Oui, chaque jour, je reçois 2 ou 3 adolescents avec leur famille. 33 enfants de 14 à 18 ans sont déjà inscrits. Je pense que nous arriverons autour de 40 avant la fin janvier et notre capacité maximale est de 80 élèves. J’ai surtout beaucoup de demandes pour la cuisine… Le critère central pour s’inscrire c’est l’âge. Nous n’acceptons pas d’enfant en-dessous de 14 ans, car notre objectif c’est de pouvoir les placer en stage en entreprise. Dans les profils des nouveaux, nous avons aussi bien des enfants qui n’ont pas la CPE, que des élèves qui ont étudié la Form 4, le prevoc, ou au MITD…
- Quels sont les challenges qui vous attendent en tant que directeur ?
Le défi sera de redynamiser l’association, et de susciter le plein investissement des parents. Quand je parle d’investissement, il ne s’agit pas du côté financier. Les frais d’écolage s’élève à Rs 500 par mois. Somme que les parents arrivent en général à payer, même quand c’est avec difficulté. Ce qui est davantage primordial à mes yeux c’est la contribution des parents à la vie de la MFR et à la réussite de leur enfant à travers la participation aux réunions, à l’encouragement de l’élève… Du côté de la MFR, l’équipe va faire plus d’efforts en 2016 pour aller aussi davantage vers les parents, faire plus de visites à domicile. L’idée est aussi de voir dans quelles conditions réelles évoluent les élèves. Et aussi apporter des formations aux parents sur leur rôle vis-à-vis de l’éducation.
- Comment se portent les finances de la MFR ?
Justement, j’allais en parler, un autre défi sera de faire entrer l’argent. Cette année, notre budget sera un peu plus conséquent que les années précédentes, car nous devons faire quelques rénovations infrastructurelles et administratives. Un autre souci auquel nous sommes confrontés c’est l’alimentation des élèves. Nous observons que certains n’ont qu’un morceau de pain chaque jour, faute de moyens des parents. Ce n’est pas suffisant pour des adolescents en pleine croissance ! Nous allons donc réfléchir comment proposer des repas chauds et débuter avec des « bring and share » pour promouvoir l’esprit d’entraide entre familles. Un autre poste de dépense est l’assurance pour la couverture de l’élève lors de son placement en entreprise. Sinon, nos élèves ont quelques avantages : le transport gratuit, comme notre centre est affilié à ANFEN et l’initiation à l’informatique, grâce à 7 ordinateurs portables donnés par l’entreprise Accenture. Il va sans dire que nous accueillons volontiers les donations financières (des particuliers ou les contributions CSR) et/ou les dons en nature.
- Depuis plusieurs années, la Fédération des Maisons Familiales caresse l'idée d'ouvrir des internats pour proposer un cursus résidentiel, où en est ce projet ?
Effectivement, en France et à La Réunion, la majorité des Maisons Familiales sont des résidences qui accueillent les élèves 24h sur 24, au moins pendant leurs périodes de formation en établissement (c’est-à-dire en dehors des stages). Cela permet de tenir des causeries en soirée, d’inculquer la culture du débat, de travailler davantage les règles de vie en société… Mais cela a un coût pour la construction, les frais de fonctionnement, l’embauche d’un personnel qualifié pour les shifts de nuit… La Fédération compte 6 maisons familiales (Vacoas en cours de lancement, Flacq, Souillac, 2 maisons à Rodrigues et la nôtre à Calebasses). Nous prévoyons déjà que le projet pilote de résidence se fera à Calebasses, car nous disposons déjà du terrain. J’espère donc que l’internat sortira de terre le plus tôt possible !
Tel : 243.7145