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Etoile d'Espérance - Association Alcool Femmes Etoile d’Espérance en deux décennies d’opération 06 juin 2018
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Pendant 20 ans, Etoile d’Espérance, association de prise en charge de femmes dépendantes à l’alcool, a mené plusieurs combats en se réadaptant à chaque fois à l’ère du temps et à ce que les changements sociaux apportent de nouveau dans la problématique féminine de la dépendance à l’alcool. Micaella Clément, directrice associée de l’ONG, en dit plus…

  • Etoile d’Espérance a fêté ses 20 ans en avril cette année. Quelles sont les réalisations dont l’association est le plus fière ?
    Notre fierté est sans conteste le projet résidentiel initié en 2006 à la maison de Moka. Au départ, nous nous lancions dans une aventure inconnue. C’était du jamais vu pour l’époque, premier centre de réhabilitation pour les femmes alcooliques à Maurice ! Le centre résidentiel nous a permis de proposer un service où les femmes concernées pourraient s’immerger dans un programme qui dure au moins trois mois, et entreprendre un travail profond, réaliste et sincère sur elles-mêmes au sein d’une communauté thérapeutique. Le travail est centré sur leurs personnalités, leurs vécus, leurs difficultés face à l’alcool et la reconstruction de leur estime de soi et l’accent est mis sur l’importance de travailler sur « un Projet de Vie » pour l’après programme, sur un sens à donner à sa vie, le vivre ensemble dans la famille et la société. Le centre Etoile d’Espérance peut accueillir 10 femmes en résidentiel et il est important de mentionner que nos services offerts sont totalement gratuits.

  • La famille coopère-t-elle suffisamment dans ce programme selon vous ?
    Dans ce processus, la famille joue un rôle primordial car sans elle, rien n'est possible, ou très peu ! De ce fait, l’association travaille en étroite collaboration avec les proches car sans le soutien, le « non-jugement » de ces derniers, le sentiment d’abandon mène vers une rechute immédiate.

  • Beaucoup de femmes et de familles vous ont suivi pendant ces 20 ans…
    Oui, elles nous ont fait confiance pendant toutes ces années en s’abandonnant aux programmes offerts, sortant de là en tant que guerrières et aujourd’hui des témoins vivants d’un parcours courageux.
    Certaines d’entre elles ont pu surmonter leurs difficultés face à l’alcool, d’autres sont encore dans le combat et souffrent en silence, en cherchant un chemin de sortie ! Eh oui, rares sont celles qui pourront y arriver seules ! Dans la majorité des cas, elles ont besoin d’aide et d’amasser une force et un courage immenses, car l’alcoolisation est devenue une habitude bien ancrée qui fait perdre totalement le contrôle !

  • Et si vous deviez changer quelque chose, ce serait quoi ?
    Nous aurions peut-être favorisé le « Travail Ensemble ! », en faisant de sorte à ce qu’il y ait plus d’échange et de réseautage avec nos amis inter-centres, le corps médical et les collectivités locales. Honnêtement, je pense que chaque structure à Maurice fait de son mieux, chacun dans son secteur et sa problématique.

  • « Chacun dans son secteur », mais difficilement ensemble ? 
    Il nous est difficile de nous fédérer, de nous réunir afin d’échanger des pratiques, des idées et des stratégies communes car nous sommes tous pris par nos engagements respectifs et le domaine des addictions est un domaine très prenant.
    Le travail en réseau est une richesse, c’est aussi sortir du quotidien, de sa routine et d’un certain « entre-soi » stérile et non-productif ! Cela donne une chance vers une vraie interrogation autour des meilleures pratiques et des possibilités d’amélioration de ses standards d’intervention.
    Je pense aussi le « referral » est important, c’est-à-dire, travailler ensemble, s’entraider et diriger les bénéficiaires vers d’autres centres en fonction des problématiques.

  • 20 ans après, les enjeux sont-ils les mêmes qu’au début ?
    L’enjeu au niveau financier est de plus en plus difficile de manière générale pour le monde associatif. Avant l’arrivée de la taxe CSR (Corporate Social Responsibility) en 2009 et les multiples changements de loi qu’il y a eu depuis, il était plus facile de frapper aux portes des firmes pour un sponsorship… De nos jours, avec la nouvelle règlementation CSR, les entreprises elles-mêmes ne disposent plus des mêmes fonds pour soutenir directement une ONG.
    Puis, une ONG doit toujours se réinventer ! Surtout dans le domaine de la réhabilitation, il est important d’innover et d’être à la pointe des changements sociétaux. L’environnement et le contexte social en 2018 ne sont plus les mêmes que dans les années 2000. Aujourd’hui, la plupart des femmes sont socialement actives, occupent des postes à responsabilité.
    Pour certaines, le stress et les exigences du travail couplés au rôle qu’elles doivent tenir au sein de la famille demandent une organisation à toutes épreuves ! Beaucoup n’occupent plus les mêmes fonctions d’antan au sein du foyer et cela est parfois source de conflit. Au fil du temps, l’alcool se glisse dans le quotidien de ces femmes lors de réceptions, au bureau, dans des rencontres entre amis…

  • Comment passe-t-on de ce train de vie actif à l’immobilisation d’une dépendance à l’alcool ?
    Entre se maintenir dans un environnement personnel et social qui facilite cette consommation ou prendre l’habitude d’un petit remontant clandestin, seule dans sa chambre… Plusieurs facteurs font que sans s’en rendre compte, avec le poids de soucis externes dans un moment de vulnérabilité, la ligne fine vers la dépendance peut être franchie car le cerveau s’est habitué à trouver du réconfort dans la prise d’alcool !

  • Comment voyez-vous évoluer l’association dans encore 5 ans ?
    C’est sûr qu’il nous faudra réfléchir à d’autres avenues pour mieux encadrer les femmes que nous soutenons. Il faudra que nous nous engagions davantage dans la prévention et la sensibilisation, qui se fait déjà dans une certaine mesure par d’autres confrères, et il nous faudra trouver une formule pour ramener plus de femmes vers le soin à Etoile d’Espérance.

  • Il y a aussi ce projet-phare qui vous tient particulièrement à cœur : le SAF (Syndrome d’Alcoolisation Fœtale)…
    Oui, le SAF est un syndrome très peu connu qui frappe bon nombre d’enfants à naître. Notre priorité serait de médiatiser cette pathologie afin de sensibiliser le corps médical incluant les professionnels de santé, sages-femmes et pédiatres, mais aussi les religieux et les dirigeants politiques !
    L’idée serait d’avoir un point d’ancrage à Maurice, une sorte de centre de documentation idéalement implanté à Etoile d’Espérance, qui pourrait apporter du soutien et une attention particulière à ces femmes enceintes atteintes d’une dépendance à l’alcool. Nous travaillons avec l’Ile de la Réunion, notamment l’organisation RéuniSAF, pour gagner en expertise et expériences dans ce domaine.

  • D’autres projets que vous avez en ligne de mire ?
    L’on déplore aussi à Maurice un manque de structure pouvant accueillir les femmes sans abri. Chez nous, bon nombre de bénéficiaires qui terminent le programme se retrouvent sans ressources et sans toit, sans le soutien de la famille ou l’amour d’un foyer… Faute d’alternatives, elles sont forcées de solliciter de droite à gauche des personnes qui pourraient les accueillir, et parfois, n’ont pas d’autres choix que de revenir vers le toit conjugal, source de leur mal-être initial. Notre souhait serait de disposer un jour d’une maison-relais où ce profil particulier de femmes malades de l’alcool pourraient vivre de manière temporaire, sans la tentation d’une rechute.

  • Quelles directions stratégiques prenez-vous aujourd’hui ?
    • Proposer plus de formation à notre personnel
    • Consolider notre présence sur le plan médiatique afin d’apporter plus de visibilité à l’association
    • Réfléchir et agir sur l’implémentation et la conscientisation autour du SAF
    • Développer davantage nos projets d’’Entreprenariat et d’Atelier Créatif afin d’autonomiser les femmes et mettre sur pied un point de vente pour leurs produits

 

Pour contacter l'association : 
Thérapie : 606 2040 / 5-903 6808
Administration : 606 3490

 

 

 

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