Le 8 septembre marque la Journée Internationale de l’alphabétisation. Josian Labonté, responsable du programme d’alphabétisation fonctionnelle et du service de formation chez Caritas Ile Maurice, explique le programme en place au niveau de cette ONG.
Les chiffres officiels parlent d’un taux qui tourne autour des 85 %, signifiant qu’il y aurait quelque 15 % de personnes de la population mauricienne qui serait analphabète ; ce qui ne reflète pas la réalité du terrain selon nous, car le taux affiché pour mesurer l’alphabétisation se base sur les personnes qui sont arrivées à bout de leur scolarité. Or, il y a beaucoup de personnes qui passent leur scolarité avec le strict minimum mais qui rencontrent plus tard des difficultés conséquentes au niveau de l’alphabétisation, difficultés qui impactent sur leur vie de tous les jours.
Oui : arriver à lire les destinations d’autobus dans les gares, à lire le dosage des médicaments, à dresser une liste de provisions, par exemple…
On peut dire qu’il est stagnant. Tous les ans nous avons au moins 1500-2000 élèves qui ne passent pas le niveau requis dans quatre ou cinq matières du cycle primaire. Ceci est attribuable à plusieurs facteurs : notre système scolaire qui reste très élitiste, alors qu’à 12 ans, certains enfants n’arrivent même pas, quelquefois, à écrire leur nom ; des problèmes familiaux, des séparations de couples qui mènent à des changements d’école pour les enfants ; la difficulté parfois à déceler dans les classes les enfants qui auraient des besoins spéciaux.
Nous avons débuté il y a une trentaine d’années (fin des années 80) à une époque où il n’y avait pas encore de classe pré-vocationnelle et les enfants se retrouvaient à la rue s’ils échouaient deux fois aux examens de la CPE (Certificate of Primary Education). Nous nous sommes tournés vers les adultes analphabètes lorsque l’école est devenue obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans.
Notre objectif primaire n’est pas d’amener le participant à apprendre une langue en particulier, que ce soit le français, l’anglais ou le créole ; notre méthode appelle à donner aux participants les outils nécessaires pour pouvoir fonctionner dans la vie de tous les jours., comme mentionné plus tôt.
Oui. Nous avons eu l’apport, également, sur plusieurs années (jusqu’en 2020) d’une psychopédagogue belge qui nous a apporté un appui technique en nous aidant à renforcer notre méthode et à la peaufiner. Si cette méthode est pour l’heure appliquée à des adultes, elle est aussi tout à fait applicable si besoin à des enfants qui seraient en difficulté dans le cycle primaire ou le secondaire.
Nous formons des animateurs en alphabétisation fonctionnelle, qui sont disposés à agir bénévolement au sein de leurs quartiers respectifs. Ils sont amenés à animer des sessions auprès de bénéficiaires en demande dans leurs quartiers, en parallèle à la formation que nous leur donnons sur notre méthode. Ils animent ces sessions dans des centres que nous mettons à leur disposition. Cela leur fait de la pratique et nous faisons le suivi pédagogique dans ces centres.
Nous avons une dizaine de centres dans des quartiers différents qui vont bientôt démarrer les programmes. La situation sanitaire fait que nous en avons bien moins cette année que les années précédentes ; où nous avions une quarantaine de centres répartis dans l’île et où nous touchions environ 500 personnes par an.
Un établissement éducatif du cycle secondaire nous a demandé récemment de former une dizaine de leurs professeurs pour qu’ils puissent gérer la question d’alphabétisation dans les classes du « Extended Programme ». Nous avons débuté cette formation il y a trois semaines environ.
Nous menions un projet de février à mars 2021, que nous avons dû stopper à cause du confinement et de la situation sanitaire : cours d’alphabétisation dans sept établissements pénitenciers de l’île : le CYC (garçons), le RYC (garçons), la prison des femmes à Beau-Bassin, la Women Open Prison, la prison des hommes à Beau-Bassin, la prison de Melrose et la prison de Grande Rivière Nord-Ouest. Nous comptons reprendre ce projet dès que possible.
Pour contacter le service d’alphabétisation fonctionnelle ou de formation de Caritas :
Tel : 212 2772 | 212 3405